
Observer les Pensées et Émotions Quotidiennes
Vous est-il déjà arrivé de vous sentir submergé par une vague de tristesse, par une colère subite ou une forme d'anxiété sans comprendre pourquoi ? Vous réagissez parfois de manière automatique, avec des pensées critiques ou des émotions négatives qui semblent prendre le contrôle de qui vous êtes durant quelques minutes et parfois quelques heures…
Ce sentiment est commun, il arrive à tous et à tout âge, mais il n'est pas une fatalité que l’on doit subir toute sa vie et faire subir à notre entourage… …
La clé pour s'en libérer est une compétence qui nous vient des Enseignements Spirituels de tous temps et tous lieux, que chacun peut développer assez facilement : l'observation de soi. Il s'agit d'apprendre à regarder ce qui se passe en soi — ses pensées, ses sensations physiques, ses émotions, sans se laisser diriger et emporter par elles.
L'objectif de cet article extrait de l’Enseignement de Selim Aïssel est de vous fournir des étapes simples et concrètes pour commencer cette pratique dès aujourd’hui, là où vous êtes, dans la vie qui est la votre ! En apprenant à observer votre monde intérieur, vous pourrez commencer à vivre plus consciemment et à choisir votre positionnement, vos réponses, vos choix plutôt que de subir vos réactions. (à moins qu’il ne s’agisse de celles de vos parents, voire de vos ancêtres…)
Nous devons déjà subir le monde extérieur qui nous arrive souvent sans prévenir… pour ceux qui le décident, une grande action est déjà possible sur son propre monde intérieur !
Pour commencer, il est nécessaire de comprendre l’origine de ces réactions incontrôlées.
Le concept fondamental à saisir est le suivant : nos réactions émotionnelles négatives ne sont presque jamais causées par l'événement présent que nous sommes en train de vivre. Elles sont des résurgences du passé, des réflexes obsolètes issus d’un âge que nous n’avons plus. Notre monde émotionnel est d’une certaine façon dans un état de "tension permanente", comme un ressort comprimé prêt à sauter à la moindre impression perçue comme négative. C’est cette tension accumulée qui explique pourquoi nos réactions sont si rapides et automatiques. Alors que nous sommes aujourd’hui fin 2025, la dernière réaction négative que nous avons eue la semaine dernière, date en réalité, de 30, 40, 50 ou 65 ans… … Elle date de cet évènement négatif (ou perçu comme tel par l’enfant que nous étions) lors de la création d’une « trace » biologique, physique ou chimique qui remonte, à la suite d’une expérience passée vécue comme douloureuse. Cette trace est la base biologique permettant la conservation et la réactivation des souvenirs.
En neurophysiologie le mot “engramme” est utilisé pour désigner l’empreinte mémorielle ancienne et durable qui résulte de modifications neuronales durant l’apprentissage.
Prenons un exemple concret : vous croisez dans votre rue un voisin que vous aimez bien, qui étonnamment aujourd’hui ne vous salue pas. Certes… il semble occupé avec son téléphone portable mais vous vous sentez immédiatement comme un peu blessé, un peu rejeté ou pas pris en compte comme à l’habitude. Cette façon intérieure de réagir ne vient ni de cette personne, ni de cette situation ! La réaction vient en réalité de "l'enfant en soi qui s'est senti rejeté" il y a bien, bien longtemps. C'est ce passé qui remonte à la surface et nous impose sa loi ! Dans cette situation banale, la réaction normale est de comprendre que son attention est fortement accaparée par cet appel.
Nous ne pouvons pas avoir une action directe sur le passé, mais lui peut d’un instant à l’autre changer notre physiologie, nos humeurs, nos émotions, nos pensées. Or, ce qui réagit en soi, c'est le passé ! Vous n'êtes plus ce passé, vous avez été ce passé… Ceci est essentiel à comprendre, car lorsque je dis « moi je n’accepte pas, lorsque je croise une personne dans la rue, qu’elle ne me regarde pas ou ne me salue pas … » Question : qui est ce « moi je … » Est-ce un moi mature, apaisé, qui comprend le contexte de l’autre à ce moment-là ?
Il est impossible de changer directement une émotion sur commande, car elle est ancrée dans une histoire sur laquelle nous n'avons plus prise. Nous ne pouvons pas modifier le passé, la seule solution est d'apprendre à se connaître, à connaître ses « ré-actions », à agir différemment dans le présent. C'est là que commence le véritable travail sur soi !
La seule et unique façon de commencer ce travail est d'adopter le rôle de : l’observateur.
Ce terme qualifié dans « L'Advaita Vedanta de “Conscience Témoin” ou de “lucidité” ; par Krishnamurti d’une « observation silencieuse sans condamnation », et plus proche de la religion : Saint-Ignace de Loyola l’appelait “l’observateur intérieur”. Les Maîtres Gurdjieff, Selim Aïssel et - d’une façon ou d’une autre - tous les Enseignants Spirituels de tous temps et de tous lieux, abordent prioritairement cette notion dans leurs Enseignements parfois - il est vrai - sous des appellations différentes.
L'observateur n'est pas un simple outil… Il provient en réalité de notre véritable « Soi », la partie de nous qui est toujours intacte (non fragmentée) et qui réside immuablement dans le présent. C'est depuis ce lieu de calme que vous pouvez apprendre à regarder le mécanisme du passé (vos réactions émotionnelles) et tenter de reprendre le contrôle.
La fonction première de cet observateur est simple : regarder, sans intervenir, et observer comment ce passé — sous forme d'émotions et de pensées — tente de vous maîtriser, de vous dominer, bref de vous imposer sa loi.
Dans un premier temps, le but n'est absolument pas de changer, de supprimer ou de contrôler quoi que ce soit. L'objectif est simplement de voir. Voir comment une tension apparaît dans le corps, voir comment une pensée critique surgit dans la tête, voir comment une émotion de tristesse nous envahit soudainement comme « sans raison ». Il arrive que l’on puisse dire « je suis triste aujourd’hui » et de ne pas du tout en connaitre la raison puisqu’en réalité tout va bien…
Maintenant que vous comprenez le rôle de l’observateur, passons de la théorie à la pratique avec quelques propositions concrètes pour pratiquer au quotidien.

Avant même qu'une pensée claire ne se forme, les émotions se manifestent dans le corps. Le corps est votre premier signal d'alarme. Apprenez à l'écouter. Prêtez attention à ses signaux :
Un nœud à la gorge ou à l'estomac.
Une tension qui apparaît soudainement dans une partie du corps (épaules, mâchoire, visage etc.)
Un changement dans votre respiration (par exemple, accélération soudaine, ou pire, soudainement avoir "le souffle coupé").
Un changement dans la posture ou la démarche (ex. : les épaules qui s'affaissent, une marche plus lourde) ou chez d’autres une agitation inattendue nous fait accélérer sans raison.
Lorsque vous ressentez l'un de ces signaux, ne cherchez pas à le faire disparaître. Contentez-vous de le constater, avec une curiosité neutre : "Tiens, j'ai soudainement un nœud à l'estomac." C'est la première étape de l'observation consciente. Observez tel l’appareil photo, le plus objectivement possible !
Des pensées négatives, critiques ou "stupides" traverseront inévitablement votre esprit. C'est un phénomène normal, et il est crucial de comprendre que vous n'êtes pas coupable de leur apparition.
Cessez de croire que vous pensez « ces bêtises soudaines », ce n’est pas votre intelligence consciente qui les fabrique, ce sont vos programmations du passé, celles de vos parents, grands-parents ancêtres… A la naissance nous récupérons d’eux tous nos talents certes, mais pas que … …
Le problème s’amplifie dès lors que vous décidez de vous accrocher à ces pensées, à les suivre, à les croire. Il faut distinguer la perception neutre et impartiale d’un événement ou d’une situation, et la critique négative, jugeante et accusante qui s’impose. L'esprit critique, en soi, est une simple "constatation du réel". Le problème survient lorsqu'une "mémoire" du passé (une peur, une blessure, une pensée négative) s'empare malgré soi de ce constat et le transforme en une histoire négative, puis pire encore, en une agression verbale par exemple. Cela induit bien sûr les réactions en chaîne que nous connaissons trop bien dans les familles…
Action possible : Quand vous remarquez une pensée négative monter : observez-la comme vous regarderiez un nuage qui passe dans le ciel. Observez-là comme un phénomène biologique lié au passé. Nommez-la intérieurement ("Ceci est une pensée de jugement, de jalousie, de peur, de plainte, de comparaison etc. »). Nommer les choses permet de s’en distancier !
Nommez ce qu’il est en train de se passer en vous et ramenez doucement votre attention au présent, à votre respiration, à des sensations physiques de cet instant, ou à ce que vous êtes en train de faire, pour lequel vous redoublez d’attention et de concentration.
Même si l'émotion intérieure est encore forte et douloureuse, vous avez le pouvoir de choisir votre attitude physique et vos paroles et actions (plutôt que réactions). C'est le moyen le plus accessible pour ne plus laisser le passé dicter votre comportement.
Si quelqu'un vous ignore et que cela vous blesse, la réaction automatique du passé serait de vous renfermer ou de devenir négatif - à votre tour - et ainsi contribuer à la souffrance dans le monde. L'action choisie depuis le présent, pourrait-être de tout de même sourire. Subir son passé ou décider de son présent ??? Certains diraient assurément : « on me fait un coup tordu et je dois en plus sourire ??? ». La réponse des chemins spirituels est : oui, oui, oui …
Dans cette situation douloureuse ou inconfortable :
Oui tu peux sourire car c’est ce sourire qui va te ramener rapidement à un bien meilleur état intérieur !
Oui tu peux sourire parce que tu sais que l’autre est l’instrument de ton Karma et sourire est la preuve que tu as décidé de t’en libérer, plutôt qu’en rajouter.
Oui tu peux sourire plutôt que renchérir, car sinon, non seulement tu n’accueilles pas le présent d’aujourd’hui, mais de plus, tu en crées un négatif qui vient se rajouter à ton futur ? Liste de bonnes raisons non exhaustive !!!
Liste de bonnes raisons non exhaustive !!!
En agissant autrement que de façon ordinairement réactive et sans maîtrise, vous refusez de laisser le passé vous dicter sa loi et vous enclenchez le début de la guérison en créant une conduite neuve et vivante, qui elle aussi se mémorise dans votre système.
Ce processus demande du temps, de la patience et beaucoup de bienveillance envers vous-même. Chaque tentative est un pas en avant, est un renforcement vers un choix de vie plus élevé et un karma qui construit immédiatement un meilleur avenir !

Le but de cette pratique n'est pas de supprimer les émotions négatives en 3 jours, mais de cultiver activement un espace d’immobilité intérieure face aux événements extérieurs et à leur répercussion en soi. Une réaction saine, vivante et authentique n'est possible qu'à partir d'un état de plus grande quiétude. Ce n’est pas pour rien si « la méditation, les mouvements méditatifs, l’apprentissage du silence, le contrôle de sa parole, la maitrise du corps etc. etc. sont enseignés, car ils enseignent la maîtrise de soi.
Le premier travail possible est de commencer par apprendre l'immobilité physique : face à un déclencheur, au lieu de réagir, de s’agiter, d’agresser, ancrez-vous un instant dans votre respiration, dans vos perceptions. Puis, cultivez l'immobilité émotionnelle et mentale : observez la vague (parfois de chaleur ou de colère, ou de peur ou de jalousie etc.) monter en vous sans la suivre !!!
Ce n'est pas une attitude passive, mais un acte conscient de stabilité, un choix de vie, un choix d’Etre ! C'est dans cette immobilité que naît la liberté : la liberté de voir le passé réagir, de le reconnaître pour ce qu'il est, et de choisir une réponse alignée avec la personne que vous décidez d’être aujourd’hui !
Un être humain en chemin dans un processus d’évolution intérieure doit avoir comme travail prioritaire de ne pas manifester ses émotions négatives. Cela lui évite d’aggraver son karma, de perdre une énergie précieuse nécessaire à son évolution et de blesser son environnement relationnel et bien au-delà, en vérité.
Rappelez-vous que chaque moment d'observation, même s'il ne dure que 3 secondes, est une victoire. C'est un pas dans la bonne direction, une étape précieuse sur le chemin d'une vie plus présente, plus authentique et finalement plus libre.
Personne ne peut décider de faire cela à notre place, car la liberté a été donnée à chacun !
Mais que faisons-nous tous les jours de cette « si précieuse liberté ? »
Brice Morot
Sur la base des Enseignements de Selim Aïssel
